Une ville à la croisée des chemins, capitale de l'Ardenne
Bastogne jouit d’une réputation de ville commerçante (ah, le shopping du dimanche !) et s'impose comme capitale de l'Ardenne . L’examen de son passé nous révèle que cette tradition de négoce est ancienne. Dès le Néolithique, les premiers échanges sont attestés avec des régions lointaines, comme le prouve l’origine des matériaux dans lesquels sont taillées des haches. Des « tombes à char » et des chemins de terre révèlent l’installation d’une société gauloise, hiérarchisée, au sein de laquelle des élites étaient inhumées avec leurs armes et leurs richesses. Proches de voies romaines comme la Reims-Cologne ou la Metz-Arlon-Tongres ou la Bavay-Trèves, les habitants des villages environnant Bastogne épousent un nouveau mode de vie gallo-romain.
Mais la première mention écrite de Bastogne n’apparaît qu’au 7e siècle, dans le testament d’un diacre de Verdun nommé Grimon qui cède « portionem vero meam in Bastoneco » à l’abbaye St-Maximin de Trèves. Une autre partie de Bastogne devient la propriété en 887, d’un chapitre de la chapelle Notre-Dame d’Aix-la-Chapelle. Au 9e siècle, un atelier bat monnaie à Bastogne où se tient un marché hebdomadaire. Jusqu’à son affranchissement en 1322 par le comte de Luxembourg et roi de Bohême, Jean l’Aveugle, la ville appartient à plusieurs propriétaires. Dès l’obtention de cette franchise, la vocation commerciale de Bastogne s’affirme : halle, agents de change lombards, riche bourgeoisie en témoignent.
Au 16e siècle, l’Italien Guichardin atteste de la solide renommée marchande de Bastogne grâce à ses foires aux grains et aux bestiaux. Il lui donne le nom de Paris en Ardenne. Il écrit « Bastonack est voisine de la forest d’Ardenne…bonne petite ville…tout le pays apporte ses biens pour par ce trafic enrichir cette place ». Jusqu’au 18e siècle, l’agriculture reste l’activité essentielle. Citons encore deux grandes voies qui seront propices au développement économique de la région. En 1729, sous la suzeraineté des Habsbourg d’Autriche, le grand chemin de Namur-Luxembourg passe par Bastogne. Puis sous la période hollandaise, Guillaume d’Orange trace une nouvelle route en 1823, notre N4. En 1869, le chemin de fer relie Bastogne à Libramont et donne une impulsion nouvelle au commerce. C’est au 19e siècle que le « quarré » devient la plaque tournante des activités des Bastognards.
Ville médiévale et espagnole
Jean de Luxembourg affranchit la ville au 14e siècle et organise sa défense en construisant une enceinte. Il accorde des droits et assigne des devoirs aux bourgeois de la cité qui accueille avec plus de sécurité les commerçants qui s’y rassemblent. En contrepartie, de copieuses taxes reviennent au « bienfaiteur » qui donne son nom au quartier de la « Behenne ». Subsiste aujourd’hui de cette enceinte urbaine, la porte de Trèves dite aussi porte basse, une massive porte à double vantail de 17 mètres de hauteur. Elle est doublée d’une herse et renforcée par trois bretèches, deux archères, puis plus tard, des canonnières. Elle sera convertie en prison jusqu’en 1914 et c’est aujourd’hui un musée que l’on visite sur réservation. Quant à l’enceinte, elle est rasée par Louis XIV en 1688.
Autre vestige de l’époque médiévale, l’église Saint-Pierre et sa tour de défense romane. Comme habituellement dans les édifices romans, la tour sert de refuge à la population. Le maître-autel et les fonts-baptismaux appartiennent aussi au courant roman. Sous l’empereur Charles-Quint, au 16e siècle, une église gothique à trois nefs se greffe à la tour. Ses voûtes d’ogives sont décorées en 1536, de peintures remarquables. Elles illustrent la vie quotidienne et l’organisation des métiers, elles racontent en images, pour le peuple illettré, des récits majeurs tirés de la Bible. Les artistes ne manquent pas de représenter le pape de l’époque Paul III ni l’empereur Charles-Quint, deux piliers de la contre-réforme catholique.
Autres éléments exceptionnels : la chaire de vérité du 17e siècle sculptée par l’atelier d’un ébéniste talentueux, Jean-Georges Scholtus et une mise au tombeau du 16e siècle provenant d’une église franciscaine disparue. La richesse iconographique des peintures et des sculptures de cette église nous renvoie à la doctrine de l’Eglise catholique, après la réforme protestante.
Plus "touristiques", les nationales N89 (de Vielsalm à Bouillon et à 4 bandes à partir de Champlon) et N4 (de Marche à Arlon et à 4 bandes sur la majorité de son tracé), ainsi qu'un réseau secondaire dense, "auto"risent la circulation dans tous les coins et recoins de l'Ardenne authentique.
Ville mémoire
La ville de Bastogne doit sa renommée internationale à un épisode tragique de l’histoire de la seconde guerre mondiale: la Bataille des Ardennes. L’encerclement de Bastogne se déroule du 16 décembre 1944 au 26 décembre 1945. Les paras de McAuliffe résistent aux puissantes attaques allemandes. Le 25 décembre, par trois directions, les blindés de Patton arrivent à leur secours.
Le calvaire des populations civiles sous le feu des combats dure une éternité. Un circuit avec panneaux thématiques est implanté aux endroits-clés de la bataille. De nombreux musées et monuments rapportent les épisodes du conflit avec des scénographies variées et complémentaires : Bastogne Barracks, Bastogne War Museum et le 101e Airborne. Un circuit dans la ville conduit aux musées aux bornes de la liberté, à 8 mémoriaux dont le monumental et emblématique Mardasson. !!! Le Mardasson est actuellement inaccessible pour cause de travaux d'entretien. Il est uniquement visible depuis le site !!!
Dès 1946, on pose la première pierre de cette étoile géante, le Mardasson, situé à l’endroit de l’ultime percée allemande, entre les bassins du Rhin et de la Meuse. Bastogne symbolise la résistance acharnée des Américains contre une offensive allemande aussi folle qu’inattendue. C’est en Ardenne que la dernière entreprise d’Hitler va échouer et que le cours de la guerre change enfin.
Pour profiter pleinement des explications de guides expérimentés dans la matière historique comme sur d’autres thématiques : patrimoine architectural, naturel, gastronomique, réservez vos visites aux spécialistes de la « compagnie des guides de Centre-Ardenne ».
Patrimoine immatériel
Les Herdiers d’Ardenne, les Géants Trouffet et Marie-Jeanne accompagnés des « Vîs Matantes », les Piches cacayes ou les Rodges Pûs sont autant de preuves du sérieux accordé par les Bastognards, au rire, aux traditions et aux plaisirs épicuriens.
De renommée ancestrale, le jambon d’Ardenne bénéficie aujourd’hui d’un label d’origine protégée qui est défendu par une confrérie créée 12 ans après la guerre : les Herdiers d’Ardenne. Leur chapitre se tient le deuxième samedi d’octobre. Dès le moyen-âge, on confiait à la garde du herdier, le troupeau commun. Il conduisait les cochons à la glandée dans les landes et les bois communaux.
Le jambon d’Ardenne est le produit d’un animal adapté aux conditions climatiques humides et froides du territoire. Son fumage particulier est réalisé avec du bois de hêtre ou de chêne, et aromatisé aux baies de genévrier. Ce qui lui donne un goût singulier.
A Bastogne, on élevait aussi des moutons et d’autres bêtes à cornes. Les bergers et les vachers avec leurs troupeaux étaient des personnages typiques de la vieille Ardenne. A ce propos, la foire aux noix rappelle une ancienne coutume du 19e siècle. En décembre, pâtres, ouvriers agricoles et domestiques se rendaient à la foire de Bastogne pour louer leur service. Une fois embauchés, ceux-ci nouaient autour de leur coup, un mouchoir rouge à pois blancs, preuve de leur engagement pour l’année suivante. Une fois le salaire assuré, les célibataires se rendaient chez l'élue de leur cœur pour lui offrir des fruits de saison : des noix et c’est ainsi que l’on nomme aussi cette foire, la foire des amoureux.
Le hasard a voulu que le Général McAuliffe en décembre 1944, réponde « Nuts », à la demande de reddition des Allemands. Nuts signifie noix en anglais et autre chose encore en langage familier ! A voir la « cave McAuliffe » à Bastogne Barracks.
Terminons le chapitre folklore par des expressions bien populaires qui nous éclairent sur l’origine des personnages appelés Piches-cacayes, littéralement « Pisses camelote » qui animent le Pat’carnaval de Bastogne. Deux jolies fontaines réalisées par l’artiste Willy Dory illustrent ces enfants frondeurs, ces gavroches du haut ou du bas de la ville. Pour les amateurs de blasons populaires, il convient de distinguer les "rawieûs d’och" ou Piche cacayes du pa la-y-ôt (les rongeurs d’os, donc les mangeurs de viande du haut de la ville), « les mougneûs d’sope d’amon lès seûrs (les mangeurs de soupe de chez les sœurs), au centre-ville, les "boveûs d’lacè do séminêre do Pa lâvâ (les buveurs de lait du séminaire du bas de la ville). Ils rappellent les rivalités qui pouvaient exister entre les habitants des différents quartiers. Quant à Trouffet, il symbolise l’Ardennais typique, un peu taquin, l’alter ego du D’Jean d’Mâdy gaumais. Et la Marie-Jeanne, elle, représente la commerçante habile.
Un musée dédié à l'Ardenne et aux Ardennais
Le Musée en Piconrue invite à découvrir la culture ardennaise à travers un patrimoine matériel et sacré aussi riche qu’étonnant. Il vous transporte au temps pas si lointain, des traditions et des croyances populaires. Il expose les peurs qui s’emparaient de nos aïeuls et que les premiers évangélisateurs n’ont pas toujours libérés. Il propose des regards diversifiés et complémentaires sur l’Ardennais d’hier et d’aujourd’hui. Un parcours de référence est dédié aux « âges de la vie », de la naissance jusqu’à la mort.
Un espace complémentaire intitulé la « Maison des Légendes » vous promène dans une forêt étrange peuplée de créatures fantastiques tels les loups-garous, les nutons ou les fées, le chasseur sauvage, Maugis et les 4 Fils Aymon, le diable dans tous ses états. Le musée propose aussi des expositions temporaires qui prolongent votre voyage dans les mythes qui caractérisent l’âme ardennaise. Piconrue, c’est aussi un service de médiation culturelle et des activités pédagogiques. Guidés dans leurs découvertes, petits et grands sont invités à porter un regard particulier sur l’Ardenne et sur le monde.
Ville sportive
A Bastogne, on aime particulièrement le vélo. La plus ancienne course cycliste Liège-Bastogne-Liège, appelée « la Doyenne » est créée en 1892. Elle clôture durement, sur un parcours accidenté de 260 km, la saison des classiques du printemps, le troisième dimanche d’avril. L’endurance et la puissance des cyclistes sont mises à rude épreuve, cette course sillonnant les reliefs ardennais pentus et sinueux des provinces de Liège et du Luxembourg.
Le monument du Baron Pierre de Crawez et la représentation de sa voiture Panhard-Levassor au rond-point de la route de Wiltz, rappelle que la première course sur route en boucle est inventée à Bastogne en 1902.
Le circuit des Ardennes est l’ancêtre de Spa-Francorchamps. De Bastogne à Bastogne, l’itinéraire comportait 5 tours d’environ 100 km via Longlier, Neufchâteau, Offaing, Léglise, Anlier, Habay-la-Neuve, Martelange et retour à Bastogne. La première victoire revient à Charles Jarrott sur Panhard. La ville renoue avec le passé de cette célèbre course tous les 3 ans au mois de juillet.
Bastogne à pied, à vélo, ...
A proximité du « carré », un joli parc est aménagé en 2001. Il est appelé Parc Elisabeth en l’honneur de la future reine de Belgique. C’est à la fois une roseraie, un jardin de plantes odorantes et d’arbres fruitiers. Là encore, une « Orangerie » accueille des expositions d’artistes contemporains. Là-aussi, un kiosque vient à point nommé pour des concerts, notamment à l’occasion de la fête de la musique organisée en juin de chaque année.
Et pour les randonneurs, les personnes à mobilité réduite ou les cyclistes amateurs de voies lentes, trois parcours « Ravel » débutent de cette gare. Le premier vous emmène jusqu’à Wiltz, le deuxième vers Houffalize et le dernier jusque Gouvy. Ils traversent des sites naturels remarquables. Un pré ravel Villeroux-Martelange commence ici aussi. Pour les plus entraînés, il existe 5 itinéraires Vtt!